A la poursuite de demain


A la poursuite de demain est un film labellisé Walt Disney. D’où certaines contraintes initiales, comme sa visée d’un large public (très large, même), ainsi que l’attestent les principaux personnages :
Venue du futur, une petite fille de 10 ans, Athéna (nom de la déesse de l’intelligence), qui n’a pas peur de conduire sans se soucier des limitations de vitesse ; elle est en quête de rêveurs capables de sauver le monde.
Casey, une ado surdouée qui, face à la noirceur intégrale distribuée par ses profs et les infos, rejette le fatalisme, refuse de renoncer à ses rêves, s’obstine à améliorer le monde. Ainsi, elle sabote les grues démolissant les fusées de Cap Canaveral, pour que son père ingénieur à la NASA échappe au chômage ; dans le feu de l’action, elle découvre un badge qui la téléporte vers les beaux lendemains.
Un vieux beau papy, Frank Walker (Clooney), un ancien génie résigné à subir la fin toute proche de la planète ; exilé de l’avenir, il va mettre du temps avant de reconnaître le potentiel de la teenager qui vient faire appel à lui, pour qu’il l’aide à changer le cours de l’Histoire.
On observe aussi dans le récit deux visions irréconciliables de l’avenir : l’une, optimiste (celle des papys), dont la source est 1965 et qui transfigure, à travers une expo universelle, les promesses d’un avenir enviable, radieux, insolent de merveilles ; l’autre pessimiste, contemporaine (celles des jeunes), qui n’annonce que cataclysmes, émeutes, attentats, famines et guerres. C’est de ce deuxième avenir dont veut se débarrasser l’héroïne teenager.
Ce film ne peut s’empêcher de délivrer trois messages, dont deux quasiment sous la forme de commandements : 1) à ton optimisme jamais tu ne renonceras (ce qui rappelle : « ne cède jamais sur ton désir », recommandation d’un célèbre psy français) ; 2) dans ta vie, toujours tu rêveras (car c’est dans le rêve que germent les solutions). Le troisième message paraît particulièrement pertinent et adapté aux tendances actuelles : le tournage en boucle, la ronde immuable des images d’apocalypse et de post-apocalypse, ça suffit ! Arrêtons d’avertir l’humanité que sa chute est proche et inéluctable. En effet, soutient le film, malgré ces abondantes et récurrentes prédictions de malheurs, les hommes et les femmes ne changent rien à leurs habitudes… Hurler à la destruction du monde ne sert finalement à rien.
Au-delà des messages, que dire de l’esthétique de ce spectacle ? La ville de demain s’impose dans toute sa splendeur, impressionnante, paradisiaque. On aimerait y trouver un pied à terre. A noter que le style de l’image se permet un détour du côté du steampunk : chez papy Clooney, dans la vieille demeure, la sortie de secours est une baignoire mobile. C’est la partie cocasse de l’histoire.
Ce qui m’a dérangé, c’est que le film cède à l’impératif scénaristique anglo-saxon : combattre un méchant tu devras ! Je sais que Satan signifie étymologiquement l’Adversaire, que notre culture est pour une bonne part manichéenne, que la vie est souvent un combat, mais, bon sang, il existe tout de même des tranches de vie qui ne se confrontent pas à des incarnations du Diable. Dans « A la poursuite de demain », celles-ci sont représentées par de vilains robots programmés pour défendre l’ordre pessimiste qu’assure la vision sombre de ce qui nous attend.
En conclusion, une ado gonflée à bloc par une volonté indéfectible peut venir à bout non seulement du fatalisme ambiant, mais encore et surtout de la catastrophe planétaire annoncée. L’avenir appartient aux rêveurs qui nourrissent l’utopie suggérée par les sciences de demain.
Film donc à voir et à méditer. Ma note : j’arrondis à 8 /10.

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