Définition de la science-fiction
Qu’est-ce que la science-fiction ?
Ébauche très discutable de réponse…
Asimov disait : « On peut définir la science-fiction comme la branche de la littérature qui
se soucie des réponses de l'être humain aux progrès de la science et de la
technologie.»
Le
problème, c'est que le progrès de la science et de la technologie ne peut être
considéré en soi, sinon, on perd la dimension humaine. « Science sans
conscience n'est que ruine de l'âme », écrivait Rabelais.
Et
puis faut-il exclure Le voyage de Simon
Morley et Le Balancier du Temps ?
de Jack Finney, dont le héros voyage dans New-York de 1882 puis en 1912, par
simple « concentration mentale » ?
Cette
littérature met en scène un phénomène non avéré par le commun des mortels au
temps de sa parution. Par exemple, 20'000
lieues sous les mers, en 1870. Elle s’interroge sur les causes et/ou les
conséquences de ce phénomène. Par exemple, la disparition de la civilisation
dans les récits post-apocalyptiques. Le déclencheur narratif est le « What
if » qui applique une sorte de démonstration par l’absurde (si les ET
étaient des cochons, ils trouveraient laide l’humanité). Le what if peut être
chimérique (Voyage au centre de la terre,
1864-1867, la téléportation dans Star
Trek new generation, 1987-1994) ou jugé à la portée de la science
contemporaine (2001, l’Odyssée de
l’espace, sorti en 1968), ou encore douteux (le prolongement de la vie dans
Jouvence d’Aldous Huxley, 1939 et
dans Le docteur Pascal de Zola, 1893).
De
nombreuses « Anticipations » négligent totalement l’enjeu
scientifique pour privilégier l’aspect sociopolitique (Soumission de Houellebecq, 2015), certaines inventant des mondes
imaginaires où les conflits politiques prennent une dimension intergalactique (La Guerre des étoiles, 1977-20…).
L’autre
problème est la notion de progrès. De quel progrès parle-t-on ? Du progrès
vers le confort ? Vers l’économie de l’effort physique ou de l’effort vers
l’autre ? Ou du progrès vers le bien-être ? Du progrès commun ou
individuel ? Du progrès vers la pagaille ou vers l’ordre ? Wells
doutait, lui, du progrès de la civilisation, dans La Machine à explorer le temps, 1895 : l’avenir de l’humanité
était la décadence et celui du soleil n’était guère plus brillant.
Pour
aider à formuler une définition de la SF, peut-être serait-il utile de répondre
à la question: quel est le plus ancien titre de la SF? Ou : quel est le récit
le plus ancien qui peut être apparenté à de la SF?
Voici
mon idée : les principales prouesses techniques décrites dans la SF
correspondent à des « rêves éternels » de l’humanité. Le rêve de voler dans Robur le conquérant de Jules Verne, par
exemple est déjà évoqué dans la légende d’Icare. Le rêve d’invisibilité dans L’homme invisible de Wells apparaît déjà
dans l’anneau de Gygès. Le rêve d’immortalité dans Frankenstein de Mary Shelley remonte à l’épopée de Gilgamesh (héros
qui se fait voler l’herbe d’immortalité par un serpent). Il en existe une multitude
: le rêve de rapetisser, le rêve de dominer le soleil, le rêve de l’abondance
et de la richesse, le rêve d’invulnérabilité. Flaubert ajouterait : le rêve de
devenir le diable… Bien sûr, il y a les grands cauchemars aussi…
Alors,
je reformule ma définition de la SF :
Présupposant le « progrès » de la
science et des techniques, la SF met en scène la réalisation d’un grand rêve ou
d’un grand cauchemar, sous la forme d’un phénomène impossible jusqu’à preuve du
contraire.
Ce
phénomène peut relever soit de la pensée magique (sans aucune explication
rationnelle, c’est du « prêt à marcher »), comme « voir à
travers le réel » grâce à des lunettes (Princesse Brambilla, Hoffmann), comme le Holodeck ou l’arrivée du repas dans Star Trek. Il peut relever aussi d’un savoir technique. Dans ce
cas, on explique « how it works », comment ça marche.
Dans
le premier cas, le lecteur découvre des phénomènes extraordinaires auxquels il
adhère sans savoir comment ils sont possibles, dans le second, on a des
phénomènes issus du génie de laboratoire avec une charge plus ou moins
importante de justifications.
Mais
ce n’est pas tout. Le phénomène en question peut encore être marqué par une
vision de la Nature, de la Psyché et de la Société, comme dans 1984 d’Orwell et Le meilleur des mondes de Huxley. Enfin, une vision de la Nature
peut être orientée par la confiance ou la défiance vis-à-vis d’elle. J’entends
ici la Nature au sens large, incluant le cosmos. Si l’on le juge fertile,
celui-ci peut receler des civilisations évoluées). On a souvent affaire alors à
des extraterrestres (ET de Spielberg
et Alien de Ridley Scott).
On
obtient donc trois genres purs de SF : la SF magique, la SF technique
et la SF visionnaire.
En
réalité, tout roman SF, toute nouvelle SF se situerait quelque part entre ces trois
pôles (il faut imaginer une localisation à l’intérieur d’un triangle). Par
exemple, La planète des singes de Schaffner et Votre Sainteté de Gapdy sont plutôt proches du pôle SF visionnaire. A.I., Jurassic
Park de Spielberg et BY de Gapdy se situent entre la SF technique et la SF visionnaire.
Un exemple de pure SF magique ? La
machine à explorer le temps de Wells.
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